Accords mets et Dôle Blanche
Ah la Dôle Blanche ! Les snobinards du flacon la tolèrent du bout des lèvres. Les mordus de l’apéro-terrasse en font la star de l’été. Et les vrais amoureux du vin lui reconnaissent des qualités certaines.
Nous, on fait partie du clan des fadas. On l’aime parce que, comme tous les vins rosés, la Dôle Blanche du Valais nous emmène en voyage. A peine le verre porté au nez, l’exubérance des arômes nous monte à la tête. A la première gorgée, les épaules se détendent, les muscles s’assouplissent, des images de farniente et de dolce vita repoussent dans le tréfond de notre esprit le mot boulot. Puis, quand le curseur est bien positionné sur vacances - à la deuxième ou la troisième gorgée généralement - il est temps d’approfondir le sujet. Car ce vin joyeux, festif et gouleyant, est un cru complexe qui cache bien son jeu.
Des arômes de fruits rouges, de groseilles, de framboises, de fraises des bois, de myrtilles ou de mûres. Mais encore des mirabelles en veux-tu en voilà, un panier de pêches de vigne ou d’agrumes, des épices douces, des parfums de roses anciennes, de violettes, un corps ample et souvent une bouche tendre et moelleuse… la Dôle Blanche se révèle plus sensuelle que banale.
Issue des mêmes cépages que la Dôle, mais pressée comme un vin blanc, la Dôle Blanche affiche avec insolence une palette de parfums, de goûts et de styles qui invite à se mettre à table.
Et on mange quoi, avec la Dôle Blanche ?
Pas question de cantonner ce vin à l’apéro, même si, avouons-le, avec des tapas, du saucisson, des mezzés ou une assiette valaisanne, les préliminaires augurent d’un futur jouissif. Ce rosé, dont l’appellation est typiquement valaisanne, accompagne sans complexe un repas tout entier.
Côté entrées :
Pour accompagner un caviar d’aubergine, un houmous de fèves ou même une salade mêlant joyeusement feuilles, légumes et fraises, aromatisée d’une vinaigrette douce, privilégiez une Dôle Blanche fraîche et fruitée (fruits rouges et pamplemousse), à la chair tendre et voluptueuse.
Avec une Dôle Blanche à la matière ronde, souple, fraîche, fruitée (groseilles et orange sanguine), imaginez un tartare de poissons, des crevettes juste sautées ou des tranches de légumes grillées à la plancha (courgettes, poivrons doux etc.)
Une Dôle Blanche suave et gourmande aux parfums de pêche de vigne et de fruits rouges fera merveille en accompagnement d’une tarte fine à la tomate, d’un tian de légumes confits ou encore d’une soupe froide de choux-fleurs aux épices grillées.
Cuisine estivale mijotée :
Servez un rosé floral, délicatement acidulé et mâtiné d’épices (curry, girofle) et de fruits confits) avec une tajine d’agneau, un ragoût de poissons au safran, de la cuisine thaï ou coréenne. Bref, la Dôle Blanche magnifie les assiettes exotiques.
Plats canailles :
Salade de queue de bœuf, légumes croquants et sauce parfumée d’une pointe de raifort, terrine de lapin aux fruits secs, salade de cervelas, les plats canailles s’accoquinent joyeusement avec une Dôle Blanche qui a de la mâche, du corps et de beaux amers en finale.
Sur le pouce :
Croque-monsieur, tartine frottée à l’ail et à la tomate, sandwich au thon ou à la truite fumée se marient avec une Dôle Blanche fruitée et légère.
Les pieds dans l’eau :
Poissons et fruits de mer appellent une Dôle Blanche à la structure discrète, bien équilibrée, avec une touche saline qui laisse en finale une sublime sensation aérienne.
A la plancha ou au barbecue :
Festive et gouleyante, la Dôle Blanche s’invite autour des mets cuisinés à la plancha et au barbecue. Pas de fausses notes ici, tous les coups sont permis.
Côté desserts :
On ne sert pratiquement jamais de vins rosés suisses avec les fromages et on a tort ! Pour autant qu’ils soient jeunes, les fromages sont les parfaits compagnons d’une Dôle Blanche.
Osez ouvrir une bouteille de ce rosé du Valais au moment de passer aux fromages. Préférez une structure ciselée qui soutiendra parfaitement un caillé frais aux figues, du sérac à la Fleur des Alpes et chutney d’abricot, ou un chèvre tendre au miel.
C’est une évidence, avec ses arômes de fruits rouges, de pêche et d’abricot, la Dôle Blanche est parfaite avec quasi tous les desserts sucrés : méli-mélo de fruits rouges, Pavlova, sorbet à la pêche, forêt noire ou même bananes flambées.
Le combat de Riquet
Dans les années 70-80, l’appellation Dôle Blanche a bien failli disparaître. Un arrêté cantonal, interdisait cette désignation pour les vins issus des cépages rouges "Pinot noir" et "Gamay" peu ou pas cuvés. Le principal argument de l’autorité était que « la Dôle étant unanimement reconnue comme un vin rouge, l'utilisation de cette désignation pour un vin blanc pourrait créer une confusion dans l'esprit du consommateur moyen. » Mais Riquet Devayes, un vigneron encaveur de Leytron, ne l’entendait pas de cette oreille car l’appellation Œil-de-perdrix, prônée à l’époque par le laboratoire cantonal, était réservée uniquement au vin rosé issu de raisins indigènes provenant exclusivement de cépages Pinot Noir. Riquet Devayes, qui avait commercialisé sa première Dôle Blanche en 1959, s’est battu plus de dix ans pour défendre cette appellation. Le premier jugement lui a été défavorable, il a fait recours au Tribunal cantonal. Nouveau refus. Le père de Gilbert Devayes, s’adressa donc au Tribunal Fédéral et sortit finalement vainqueur de ce long combat législatif et judicaire.
Pour rendre hommage à son père, Gilbert Devayes a inscrit en lettres flamboyantes le nom Riquet sur sa bouteille de Dôle Blanche.